Infirmière coordinatrice
Christelle Touchot est infirmière depuis 15 ans. Elle travaille au sein de l’association ADALI depuis bientôt 5 ans en tant qu’infirmière coordinatrice auprès des mineurs non accompagnés (MNA).
Le public spécifique des MNA lui était inconnu mais l’accompagnement global qui est mis en place autour des jeunes accompagnés a représenté pour elle un réel intérêt. « C’était un nouveau défi… réussi puisque maintenant je suis en CDI. Le soin est important dans la prise en charge des mineurs ».
Christelle a validé cette année un diplôme interuniversitaire Santé, Société et migration. Son mémoire avait pour thème Là-bas j’étais, ici je suis, demain qui serai-je. Ou comment se reconstruire après le traumatisme que le parcours migratoire peut engendrer chez le jeune mineur non accompagné. Cette formation lui a permis de réinterroger la manière de prendre en charge la santé des jeunes et notamment la santé mentale.
Pour Christelle, la bonne prise en charge de la santé, physique et mentale des jeunes est essentielle. Il est important d’inscrire l’accompagnement dans une logique préventive avec ce public. Par exemple, les jeunes qui arrivent sur le territoire sont systématiquement dépistés pour la tuberculose. Un partenariat est également mis en place avec le centre de médecine préventive pour un bilan complet de leur santé. Ce bilan permet d’aborder de nombreux aspects de leur santé avec eux. S’en suit un accompagnement du parcours de soin des jeunes lorsque des pathologies sont décelées. Par ailleurs, les infirmières de l’association accompagnent les jeunes sur tout ce qui a trait au bien-être et à la prévention primaire : hygiène corporelle, hygiène alimentaire, hygiène des logements, etc.
Cette prise en charge est complexe au quotidien : « il y a une grosse différence culturelle entre nos visions de la santé et celle de la culture africaine, nous accompagnons beaucoup de jeunes venus d’Afrique ». Il s’agit de les faire « adhérer au soin sans qu’ils ne se sentent forcés et en leur expliquant les bienfondés d’un suivi régulier ». De plus, les jeunes accompagnés ont peu de connaissances physiologiques sur le fonctionnement du corps humain et une prise de sang peut être vécu comme le retrait de quelque chose qui va ensuite manquer : « il faut retravailler avec eux la base de la physiopathologie. En atelier, sur la sexualité, les jeunes ne connaissent pas le mécanisme de l’appareil reproducteur. Les règles sont là et puis c’est tout ». Le travail des infirmières, et de manière générale des professionnel-les qui accompagnent les jeunes, est d’adapter les modalités de leur suivi aux connaissances et particularismes culturels du public. Avant et pendant les soins, avant et après les rencontres avec les professionnel-les de santé, il faut expliquer les raisons d’un suivi ou d’une intervention : « il faut réexpliquer que même s’ils ne se sentent pas malades, ils le sont et doivent se protéger et protéger les autres ».
Bien que sa mission soit aussi l’écoute des jeunes, Christelle travaille en étroite collaboration avec la psychologue de l’association vers qui elle oriente les jeunes qui le souhaitent pour un accompagnement renforcé sur les questions de bien-être psychologique. Au vu des épisodes traumatiques vécus par les jeunes durant leur parcours migratoire, ils sont invités à partager leurs expériences afin d’être accompagnés dans un processus de résilience.
L’objectif de cet accompagnement est donc double :
- Accompagner les jeunes vers l’autonomie sur un temps court pour qu’à la fin de leur prise en charge, ils puissent prendre soin de leur santé et bien connaitre les structures ressources vers lesquelles se tourner sur le territoire. « On a réussi notre mission quand les jeunes prennent leur rendez-vous tout seul chez le médecin ».
- Leur « permettre de se reconstruire ici. Par la résilience mais cela passe également par le tissage d’un réseau, social, professionnel. Le lien est très important, surtout dans leur culture ».
Pour Christelle, une des plus grandes satisfactions est de « revoir des jeunes deux ou trois ans après avoir quitté le service et ça va, ils se sont reconstruits, ils ont un boulot et ils sont fiers. Fiers d’avoir réussi. C’est satisfaisant parce qu’on voit l’intérêt de notre mission. Et au vu des échanges que j’ai pu avoir avec d’autres professionnel-les, ADALI propose une bonne prise en charge des jeunes, malgré les contraintes ».